Comment Éviter les Pièges Juridiques et Sécuriser vos Pratiques en Entreprise
Le forfait en jours constitue un dispositif permettant de décompter le temps de travail non pas en heures, mais en jours travaillés sur l’année. Bien qu’il offre une certaine flexibilité, ce dispositif est soumis à des règles strictes édictées par le Code du travail et complétées par une jurisprudence abondante. Dans cet article, je détaille les principales étapes et précautions à prendre pour une mise en place conforme et efficace du forfait en jours.
Découvrez comment mettre en place un forfait en jours conforme, éviter les erreurs fréquentes et protéger votre entreprise des sanctions.
Qu’est-ce que le forfait en jours ?
Le forfait en jours permet de déroger aux dispositions relatives à la durée légale du travail, aux heures supplémentaires, ainsi qu’aux durées maximales journalières et hebdomadaires de travail. Cependant, il ne peut être appliqué que dans les entreprises couvertes par un accord d’entreprise ou, à défaut, par un accord de branche (C. trav., art. L. 3121-55).
Les étapes préalables à la mise en place du forfait en jours
1. Identifier les salariés éligibles
Seuls certains salariés peuvent bénéficier d’un forfait en jours, à savoir :
- Les cadres disposant d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps, dont les fonctions ne les conduisent pas à suivre l’horaire collectif (C. trav., art. L. 3121-58).
- Les salariés non-cadres dont la durée du travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d’une autonomie réelle (Cass. soc., 21 mars 2012, n° 10-20.237).
Critères d’autonomie
Le juge contrôle strictement l’autonomie des salariés. Un forfait en jours ne peut s’appliquer si le travail du salarié est soumis à :
- Un planning contraignant (Cass. soc., 15 déc. 2016, n° 15-17.568) ;
- Une présence permanente à des horaires fixes (Cass. soc., 27 mars 2019, n° 17-31.715).
Cependant, l’autonomie n’implique pas une totale liberté sur les horaires de travail. Des contraintes organisationnelles, comme assurer la fermeture d’un magasin, peuvent être compatibles avec le forfait en jours (Cass. soc., 15 déc. 2021, n° 19-18.226).
2. Existence d’un accord collectif
La mise en place du forfait en jours repose sur un accord collectif prévoyant :
- Les catégories éligibles ;
- La durée annuelle maximale, fixée à 218 jours par an (C. trav., art. L. 3121-64) ;
- Le suivi et l’évaluation de la charge de travail ;
- Le droit à la déconnexion (C. trav., art. L. 3121-65).
Attention : En l’absence d’un accord collectif valable, l’employeur ne peut pas imposer un forfait en jours de manière unilatérale (Cass. soc., 13 déc. 2006, n° 05-14.685).
3. Consultation du CSE
Le comité social et économique (CSE) doit être consulté avant la mise en place du forfait en jours, notamment sur l’impact de ce dispositif sur les conditions de travail et de santé des salariés (C. trav., art. L. 2312-26).
4. Recueil de l’accord du salarié
L’accord du salarié est indispensable et doit être formalisé par une convention individuelle écrite (C. trav., art. L. 3121-55). Une simple mention sur le bulletin de paie ne suffit pas (Cass. soc., 4 nov. 2015, n° 14-10.419).
Contenu obligatoire de l’accord collectif et de la convention individuelle
Un accord collectif valide doit garantir :
- Un dispositif de contrôle des jours travaillés (Cass. soc., 29 juin 2011, n° 09-71.107) ;
- Le respect des durées minimales de repos (11 heures consécutives par jour et 35 heures consécutives par semaine) (Cass. soc., 17 déc. 2014, n° 13-22.890) ;
- Une évaluation régulière de la charge de travail.
La convention individuelle de forfait doit préciser :
- Le nombre de jours travaillés ;
- Les modalités de suivi de la charge de travail ;
- Les conditions de repos et de déconnexion.
Sanctions en cas d’irrégularité
Accord collectif non conforme
Un accord collectif non conforme entraîne la nullité des forfaits en jours. Les salariés peuvent alors réclamer le paiement des heures supplémentaires selon les règles du droit commun (Cass. soc., 7 juill. 2015, n° 13-26.444).
Absence de suivi
Un manque de suivi de la charge de travail expose l’employeur à des sanctions et à des demandes de dommages-intérêts pour atteinte à la santé des salariés (Cass. soc., 26 sept. 2012, n° 11-14.540).
Régularisation d’un forfait en jours non conforme
En cas d’irrégularité, l’employeur doit :
- Négocier un accord collectif conforme ;
- Rédiger de nouvelles conventions individuelles ;
- Instaurer un dispositif de suivi rigoureux (entretien annuel, déclaration des jours travaillés).
Conclusion
La mise en place du forfait en jours est un outil de flexibilité intéressant pour les entreprises, mais son encadrement strict impose une vigilance accrue. Employeurs et salariés doivent s’assurer que le dispositif respecte à la fois les dispositions du Code du travail et les garanties jurisprudentielles.
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